En avril 2004, nous avons été alerté par une amie, grande amateure de jardin, inquiète de la mauvaise
santé de ses ficus benjamina. Une rapide enquête auprès de différents jardins nous a convaincus
de la généralisation de l'épiphytie à Kourou. Au long de la saison sèche, elle semble avoir régressé
mais avec les précipitations récentes marquant l'approche de la saison des pluies, les symptômes
réapparaissent très nettement sur les jeunes pousses.
Les feuilles sont repliées sur
elles-mêmes autour de la nervure centrale et constellées de petites taches diffuses de couleur
brun rouille. Cette nervure est parfois déformée en ondulations plus ou moins marquées.
Les feuilles atteintes se déssèchent en conservant une coloration vert grisâtre
et restent attachées sur les rameaux. Ceux-ci ne sont pas modifiés.
La photo ci-contre montre des symptômes intéressant les jeunes feuilles, nouvellement formées.
Les feuilles anciennes ne sont pas altérées. Les deux morceaux de limbe repliés renferment des petits "vers" minuscules blanchâtres.
Examinés à la loupe, nous avons pu reconnaître des adultes et des larves de Thrips(Cf la photo ci-dessus). Nous ne sommes
pas compétents pour identifier l'espèce.
Messiaen ("Le potager tropical" pages 110-111) écrit : "les Thysanoptères ou Thrips sont de
très petits insectes dépassant à peine le mm de long (métamorphoses incomplètes, pièces
buccales dissymétriques piqueuses, ailes plumeuses).Ils vivent à l'aisselle des feuilles,
ou dans les fleurs, soit en simples commensaux, soit en provoquant des dégâts nécrotiques
ou des chutes de fleurs.Les Thrips, par leurs piqûres, lysent des groupes de cellules
sous-épidermiques et en aspirent le contenu.Le plus répandu est Thrips tabaci qui
fait des dégâts sur de très nombrueses plantes, en particulier sur Allium.
Beaucoup plus redoutable, capable d'attaquer coton, Légumineuses, poivron, et surtout
aubergine et cucurbitacées (concombre et melon), le Thrips palmi a provoqué de très
graves dégâts dans la zone antillaise où il était inconnu jusqu'en 1985.
Originaire de l'Asie du Sud-Est (Réunion, Nouvelle Calédonie, Philippines), il y est sans doute
tenu en respect par des ennemis naturels, car il y provoque moins de dégâts que dans les
lieux d'introduction récente.... Aux Antilles, ce Thrips sévit tout particuiièrement
en conditions sèches sous irrigation, beaucoup moins dans les zones à plus de 2 m de pluie
annuels(ce qui laisserait imaginer l'intervention d'une mycose). Le temps de génération est
rapide (20 jours à 25-30°C), les nymphes du dernier stade se laissent tomber à terre pour
y subir la transformation en insectes ailés.
Très peu d'insecticides sont efficaces contre cet insecte, il faut des "translaminaires"
et non des "systémiques"(le Thrips ne pique pas les vaisseaux).
L'insecticide organo-phosphoré de synthèse autorisé aux Antilles, par dérogation spéciale
(prophénophos), n'aurait pas eu d'effet suffisant pour sauvegarder les productions légumières."
Les entomologistes de l'INRA Antilles-Guyane (toujours selon C.M.MESSIAEN) suggèrent quant à eux
d'arrêter tout traitement insecticide.
A l'appui de cette assertion, il conviendra d'observer
les évolutions des ficus avec la reprise des traitements anti-moustiques effectués par le service
municipal de Kourou.
Le Profénofos a été radié de la liste des insecticides autorisés par la Commission Européenne par
décision du 20/11/2002 , mise en vigueur le 25/07/2003. Un nouveau translaminaire, l'abamectin (Syngenta Agro)
pourrait être expérimenté pour le cas des ficus.
Autre bibliographie : www.mrec.ifas.ufl.edu/lso/Thrips.htm (Université de Floride)
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Kourou, avril 2005